L’interdiction de principe de sous-location, sauf autorisation expresse du bailleur
Il y a sous-location lorsque le titulaire d’un contrat de location met partiellement ou entièrement à disposition d’une personne son logement en échange d’une contrepartie financière.
S’agissant des locations vides ou meublées constituant la résidence principale du locataire, l’article 8 de loi du 6 juillet 1989 indique que le locataire ne peut sous-louer son logement sauf avec l’accord écrit du bailleur. C’est ainsi qu’en pratique la plupart des baux d’habitation prévoit expressément une clause interdisant la sous-location à peine de résiliation du bail.
Pour pouvoir sous-louer licitement son logement, le locataire doit obtenir expressément et par écrit l’accord du bailleur tant sur le principe de la sous-location que sur le montant du loyer de sous-location ; étant précisé que le montant du loyer de sous-location ne pourra en aucun cas “excéder celui payé par le locataire principal” (article 8 de la loi du 6 juillet 89).
Ce plafonnement est rapporté au mètre carré de surface habitable.
Réunir des moyens de preuve établissant l’infraction de sous-location sur la plateforme de type Airbnb
Le locataire qui sous-loue son logement sans avoir été expressément autorisé par son bailleur commet par définition une infraction, dont les conséquences peuvent être désastreuses.
Dans de telles circonstances, le bailleur peut engager une procédure d’expulsion à son encontre devant le Tribunal d’instance du lieu de situation du logement mais également solliciter le remboursement des sous-loyers perçus par ce dernier, outre des dommages et intérêts.
Pour cela, le propriétaire doit se prémunir de preuves aux fins de faire constater l’infraction de sous-location commise par son locataire et d’en justifier par devant le Tribunal de céans.
Plusieurs moyens sont mis à votre disposition :
- faire établir un constat d’huissier sur internet de l’annonce publiée sur la plateforme Airbnb (ou toute autre plateforme similaire), lequel permettra de révéler les nombreux commentaires des sous-locataires, la date de parution de l’annonce ;
- saisir le Président du Tribunal d’instance des lieux loués d’une requête aux fins de désignation d’un huissier de justice. A l’issue de cette requête, le Président rend une ordonnance aux termes de laquelle elle désigne un huissier et fixe ses missions.
L’intérêt de procéder par la voie de la requête est de permettre à l’huissier de pouvoir se rendre sur les lieux loués avec l’aide éventuelle d’un serrurier sans que votre locataire soit prévenu préalablement. Cette procédure est intéressante dans le sens où elle permet à l’huissier de pouvoir pénétrer par surprise dans les lieux loués et de constater la présence d’effets personnels des touristes, de pouvoir les interroger s’ils sont sur place. L’ensemble de ses investigations seront reportées aux termes de son constat.
Elle permet également de palier au constat d’huissier sur internet dans l’hypothèse où vous ne parviendrez pas à trouver l’annonce de votre locataire sur la plateforme internet. Une fois le constat d’huissier établi, il conviendra d’adresser une sommation au locataire de communiquer l’ensemble de ses relevés Airbnb afin de connaitre le nombre de nuitées qu’il a réalisées et les sommes perçues à ce titre.
Il existe également d’autres moyens de preuve mais dont la force probante reste à la libre appréciation du juge comme : les mails échangés avec votre locataire aux termes desquels il peut vous indiquer avoir cassé par exemple sa serrure ou perdu le double des clés ; les captures d’écran.
Assigner votre locataire pour obtenir le remboursement des fruits civils tirés de la sous-location airbnb et son expulsion
Une fois les preuves réunies, il conviendra de saisir le Tribunal d’instance des lieux loués. A cette occasion, l’avocat saisi de votre dossier devra solliciter :
l’expulsion des lieux loués de votre locataire et de tout occupant de son chef,
le remboursement de la totalité des sommes qu’il a perçues dans le cadre de l’activité illicite de sous-location, correspondant aux fruits civils revenant par accession aux propriétaires conformément aux décomptes Airbnb communiqués, éventuellement la réparation d’un préjudice moral et/ou financier au titre des dégradations.
Sur ce point, la jurisprudence a très rapidement évolué en faveur des bailleurs.
Toutefois, un arrêt 5 juin 2018, la Cour d’Appel de Paris a marqué un coup d’arrêt au plus grand bonheur des propriétaires dès lors qu’elle a condamné les locataires à rembourser la totalité des sommes qu’ils avaient perçues au titre de la sous-location non autorisée de leur appartement, en se fondant sur la théorie de l’accession.
Pour parvenir à cette fin, la Cour d’appel a retenu que les loyers perçus au titre de la sous-location sont des fruits civils de la propriété (art 546 du Code civil) et qu’ils appartiennent de facto au propriétaire, et qu’en conséquence le détournement fautif au détriment du propriétaire de fruits civils produits par la sous-location de la propriété immobilière, cause nécessairement un préjudice financier à celui-ci, qu’il convient de réparer en son intégralité.
Le remboursement des sous-loyers issus de la sous-location Airbnb a été confirmé par la Cour de cassation aux termes de son arrêt du 12 septembre 2019. Pour confirmer l’analyse de la Cour d’appel, elle a indiqué que les sous-loyers perçus par le preneur devaient être restitués au bailleur dès lors qu’ils constituent des fruits civils qui lui appartiennent par accession.
Si par extraordinaire le locataire ne transmettait pas ses décomptes, il appartiendra à votre avocat d’en tirer toutes les conséquences utiles. A ce titre, je vous informe que mon cabinet a développé des moyens coercitifs innovants pour obtenir le décompte des nuitées auprès du locataire contrevenant.
Est-il possible d’assigner la plateforme qui a permis la sous-location sans mon autorisation ?
L’article L324-2-1 du Code du tourisme impose depuis 2016 aux plateformes et intermédiaires, sous peine d’une amende de 12.500 € depuis la loi Elan du 23 novembre 2018 :
- d’informer le loueur d’un meublé de ses obligations de déclaration ou d’autorisation préalable et d’obtenir de sa part une déclaration sur l’honneur attestant du respect de ces obligations, indiquant si le logement constitue ou non sa résidence principale, ainsi que le cas échéant le numéro de déclaration du logement ;
- l’autorisation de sous-location transmise par son bailleur ;
- veiller à ce que le logement, lorsqu’il constitue la résidence principale du loueur ne soit pas loué (ou sous-loué) plus de 120 jours / an.
Ainsi, il semblerait que bailleur puisse obtenir cumulativement la condamnation du locataire et de la plateforme en cas de sous-location de son logement dès lors qu’elle ne rapporterait pas la preuve que le locataire lui ait transmis l’autorisation de sous-location. Toutefois, une étude précise de votre dossier par un avocat pourra vous dire vos chances de succès quant à cette dernière action, dès lors qu’à ce jour, il semblerait que très peu de décisions aient été rendues en ce sens.